Fragile comme un fil de soie
Comme un chagrin qui passera
Fragile témoin de mon état
Sur la corde raide d’un funambule
Je vais je viens je déambule
Mon esprit est épris de tout
Il vagabonde et s’envole au-delà
Au-delà de la vie terrestre dans laquelle la nausée existentielle fait de moi une hirondelle, une hirondelle qui contemple la nature, et qui n’en revient pas.
Avide de mots, je bois jusqu’à la lie les témoins de ma vie, ceux qui me tiennent chaud, ceux qui purifient mon esprit,
Le substrat affiné, aiguisé comme une lame de rasoir, illumine mes songes et fait fi de ce qui me ronge.
En harmonie parfaite avec l’auréole du temps, les jours recommencent à évoluer vers une autre saison, la saison éclairée, le ciel est ouvert, je mange la lumière du jour, la lumière qui semble dire toujours. Je lève les yeux vers des cieux qui se fichent pas mal de la saison, du jour, du temps. Ils sont là depuis la nuit des temps, le ciel a toujours vingt ans, définitivement. Il respire avec un buste de dieu immortel et puissant, toujours neuf, il fait abstraction du souffle du vent qui le mène là où l’on ne meurt jamais, puisque tout est balayé. Le ciel ne se trouble qu’en surface, lorsque la lune lui emprunte une infime partie, un coin de ciel, un coin de vie, lorsque les nuages envahissent quelques infimes morceaux d’un ciel infini.
Quand le soleil est trop chaud, la terre semble s’enflammer par ses rayons allumée. On ne prête jamais attention à l’âge des saisons, à l’âge des étoiles, à l’âge de la terre, à l’âge de la nature qui est pourtant l’essence même de nos quintessences. L’homme est ainsi fait. Il ne voit pas ce qui lui crève les yeux, le musée permanent dans lequel nous évoluons, la vie prolifère sans cesse. Les herbes des champs, la lune d’argent, le soleil imminent, la nature est un documentaire, sans début et sans fin dont nous ne voyons pas les acteurs principaux, les fleurs poussant dans un coin de verdure, nous ne prêtons pas attention à la vie des oiseaux, composant leur vie parmi les vieilles branches, fragiles brindilles, où ils brodent leur nid, adorable et merveilleux abri, pour protéger leurs petits. L’eau, la rivière, la mousse et les rochers, tout cela nous est égal, pas le moindre effet à l’horizon. Non, nous ne voyons que le mauvais côté de la vie, les horreurs nous torturent et nous aimons ça, puisque remettre de l’ordre dans ses idées semble être pour nous une insurmontable possibilité. Consommer sans modération un regard absolu jusqu’à l’indiscrétion, posé sur les choses, sur les êtres, les animaux pour lesquels jamais rien n’est fortuit, tout est si bien ordonné dans la grande parade de la vie. Le cycle biologique à la logique sans faille est une référence qu’il serait sensé de ne pas oublier. L’ostentatoire n’aurait plus rien à espérer, la nature reprendrait ses droits et nous montrerait le chemin qui n’a pas changé, si l’on s’en réfère aux jours d’hier, aux jours d’avant. Avant que la vie de la cité ait le droit de nous faire payer la beauté, la connaissance, le savoir, dans des galeries, la nature est en cage, une grande partie tout au moins. Prendre conscience de tout cela serait un grand pas pour les Hommes, un pas de géant, mais je déraisonne… sûrement.
« J’ose presque assurer que l’état de réflexion est un état contre nature, et que l’homme qui médite est un animal dépravé. » Jean-Jacques Rousseau