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Extrait II

« Le désir mesure la profondeur du cœur », desirium sinus cordis. Sentence d'Aristote extraite de « Le Cœur Absolu » de Sollers. Je rajouterais : "L'intégrité mesure la profondeur de l'âme."

Mes chevaux ont été nourris, tout va pour le mieux. Je m’éveille à l’instant même, premier réflexe,  écrire, café double et doublement fort. Neurones en action, j’entre dans le périlleux naufrage qu’est la littérature, car il s’agit bien d’un naufrage, d’un abandon total de soi, pour les Autres, et pour soi-même. Cela me convient parfaitement, je laisse aller mes mains sur le papier, je suis à la lettre les conseils de mes pairs, exécute quelques variations, il faut bien trouver son style,  et la substance aura la couleur la plus parfaite qui soit, enfin, voilà mes intentions. Vous serez seuls juges, à me condamner ou à m‘absoudre. Pour l’instant, je poursuis avec le plus de précisions possibles la façon dont je vais m’y prendre, le retracement de ma vérité. Avec  ferme intention de tout dire, à moi de mettre les mots sur leur trente et un. Pas de maquillage mais beaucoup de pureté, une peau d’albâtre digne d’un tableau de Manet surgira d’entre mes lignes, il faudra juste plonger dans l’abîme avec moi. Je peux déjà vous indiquer que cet abîme dont je vous parle est un lien entre vous et moi. On n’en sort grandit, promis. Vous êtes ici pour moi, et l’intérêt que vous me portez, m’encourage fermement à ne pas vous décevoir. Il est temps, beau temps, grand temps, de me mettre nue devant vous, complètement nue. Et la chaleur sera humaine ou ne sera pas.  A l’horizon se profilent toute une armée de roturières, dont la courtisane de Van Gogh, superbe japonaise vous toisant de son regard malicieux et provocateur, la ronde des Peintures, celles dont je suis la tonalité. Musique, lyrisme, couleurs, tons,  le mélange des genres. Vous verrez, on va bien s’amuser, c’est juré. Je sens déjà monter en moi un bonheur sans égal, quelque chose d’inconnu s’immisce et m’indique la route, la trame du livre.

Mais j’y pense, vous connaissez déjà beaucoup de moi, alors il va falloir faire dans l’inventivité, avec le masque des intentions, la volupté insérée avec délice, jusqu'à éclosion totale. Je suis ce que je lis, comme tout le monde, je crois. Et je lis beaucoup, alors inéluctablement je suis beaucoup.

Mes amours vont être passées au crible, avec aisance, enjolivées, mais sans grand changement. Vous ne vous apercevrez de rien !

Mon époux a  en lui cette intelligence là, celle de me laisser écrire ce que je veux, j’ai désormais toute sa confiance. C‘est là, une grande chance. Seul, compte son avis. Il sait qu’il fut toujours le seul qui ne compta jamais dans ma vie secrète, celle que je tais aux gens et que je narre aux lecteurs. Je pourrais presque ne parler uniquement de mes histoires d’amour, ça tombe à pic, nous sommes le jour de l’amour, pas seulement celui des amours vivantes, celles qui furent ont aussi leur mot à dire. Alors, je vais leur laisser la parole...

Nota bene : Merci de me faire part, directement ou non, de votre avis sur la question. Toutes réflexions seront les bienvenues.

Joyeuse Saint-Valentin!

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